Le Relais Enfant
Le partenariat dans l’âme
Atelier-chantier d’insertion déployé à Cherbourg et dans le Cotentin, le Relais Enfant s’est donné pour mission de subvenir aux besoins matériels et alimentaires des familles adhérentes. Sa force ? Avoir su créer un véritable réseau de partenaires issus pour une bonne part du secteur marchand.
Un antique poste radio des années 50, une lampe à pétrole et quelques bibelots éparpillés çà et là. Le bureau de Matthieu Giovannone, directeur du Relais Enfant, ressemble à un cabinet de curiosité. Mais il semble aussi vouloir dire autre chose. Si les objets ont une âme, n’auraient-ils pas une seconde vie en devenir ?
Initialement, le Relais Enfant a été créé en 1995 pour collecter des textiles. « Mais le spectre s’est élargi rapidement car les dons se sont diversifiés », explique Matthieu Giovannone. Aujourd’hui, le Relais collecte, trie et revend dans ses boutiques des produits à usage domestique : textile, chaussures, objets de puériculture, vaisselle, meubles, et produits alimentaires. Tout ce que l’on peut trouver dans une maison, mais à moindre coût.
Double vocation
Le Relais Enfant intervient dans le champ de la solidarité auprès de 5000 familles adhérentes. Mais cette vocation se double d’une action en faveur de l’insertion socioprofessionnelle. « Le Relais Enfant n’est pas une structure humanitaire ou caritative », précise son directeur. « C’est une association d’activité économique qui, au titre de son statut d’atelier-chantier d’insertion, propose à ses bénéficiaires un parcours de professionnalisation ».
Avec ses 10 sites maillant le territoire du Cotentin, l’association représente une belle petite PME à l’échelon local. La structure vit grâce à une part importante d’autofinancement.
Aujourd’hui, quatre camions tournent du lundi au samedi pour assurer les collectes et recueillir les dons des entreprises, des collectivités ou des particuliers. Le Relais Enfant a également passé des conventions avec des déchetteries pour installer des bennes recueillant les objets en bon état qui pourraient être revalorisés plutôt que détruits, notamment du mobilier.
La collecte textile est une filière aboutie puisque le Relais Enfant dispose de bornes de dépôt accessibles au public à proximité de la voie publique. « Dans nos ateliers, nous trions, lavons, repassons. Nous vendons en boutique seulement 10 % de la collecte. Ce qui est écarté pendant cet écrémage part vers Cabanor Tritex1, une entreprise de tri industriel. »
Créer des cercles vertueux
La réussite du Relais Enfant tient pour beaucoup dans sa capacité à nouer des partenariats avec les collectivités mais aussi avec les entreprises du secteur marchand. Pas moins de 70 PME-PMI ! « Au cours de leur parcours, nos salariés doivent acquérir des compétences transférables vers d’autres secteurs d’activité », précise Matthieu Giovannone. « Cela passe par une période d’immersion en entreprise qui permet d’infirmer ou de confirmer un projet professionnel. Aubert, Auchan, Carrefour, Les Maîtres Laitiers du Cotentin, des magasins d’habillement, des maisons de retraite sont devenus nos partenaires. » Les entreprises s’impliquent car il n’y a pas d’enjeu pour elles. Mais il est arrivé que ces périodes d’immersion se soldent par des embauches, même si ce n’est pas l’objectif premier.
Autre mode de partenariat : le don de produits, notamment avec la grande distribution qui est taxée sur sa valeur stock. Mieux vaut donner que détruire ou brader un stock sur lequel on sera imposé.
Dernière modalité, les relations plus informelles, comme avec ce concessionnaire Peugeot à Valognes, qui suit la flotte de véhicules de l’association ou avec l’assureur AXA Couppey. « Nous avons appris à nous connaitre, une confiance réciproque s’est installée nous nous rendons des services non marchands, comme un réseau d’échanges de savoir. Le partenariat a permis de créer un cercle vertueux entre nous », résume Matthieu Giovannone.
Partenariat mode d’emploi
Matthieu Giovannone a suivi un long parcours de militant associatif. Mais il a aussi mené en parallèle une carrière dans l’import-export. Jusqu’au jour où, fatigué par la dictature du chiffre, il a choisi de se réorienter vers l’économie au service de l’homme. Ce passé est un atout concède-t-il. « Pour nouer des partenariats, il faut rencontrer les entreprises et être force de proposition. »
Il ne faut donc pas négliger la construction de son réseau et de ses appuis. « Mais attention, prévient-il, beaucoup de partenariats dépendent de la rencontre de deux individus qui partagent des valeurs communes. Lorsqu’un directeur de grande surface est muté, rien ne vous assure que vos relations se poursuivront avec l’arrivée de son successeur. »
1Cabanor Tritex traite 1800 t de textile par an, 30 salariés. L’entreprise appartient à un collectif de 13 associations bas-normandes.